recouvrement des créances du bénéficiaire de l'immunité d'exécution

 


Dans les rapports avec les tiers, les personnes sont amenées à établir des contrats qui créent par la suite à l’égard des différentes parties des obligations.

En matière de contrat, nous avons au moins deux personnes qu’elles soient morales ou physique.

D’abord nous avons le débiteur, le terme débiteur désigne en droit celui qui s’est obligé à exécuter une prestation et le créancier c’est la personne envers qui le débiteur est tenu de s’exécuter. Lorsque celui-ci s’exécute dans le délai fixé par les clauses de leur contrat, on dit qu’il s’est libéré, de ce fait, le créancier n’aura en principe plus de recours contre ce dernier.

Le problème du recouvrement forcé subvient lorsque le débiteur est défaillant. C’est à dire refusé de s’exécuter après la date d’échéance.

      Celui-ci pourrait-il se voir contraindre de s’exécuter ?

Nous avons la réponse dans l’acte uniforme portant recouvrement et voies d’exécution en son article 28  

« À défaut d’exécution volontaire, tout créancier peut, quelle que soit la nature de sa créance, dans les conditions prévues par le présent acte uniforme, pratiquer une saisie pour contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses obligations à son égard ou pratiquer une mesure conservatoire pour assurer la sauvegarde de ses droits »

Le principe de poursuite du débiteur. Tout débiteur peut être saisi. En vertu de cette règle, le créancier peut saisir les biens de son débiteur pour le contraindre à exécuter ses obligations, c’est un des principes incontestés du droit des obligations, et vu que tout principe a des atténuations ce principe n’échappe pas à la règle.  

Il est généralement admis que certains débiteurs ne peuvent être saisis lorsqu’ils bénéficient exceptionnellement d’une interdiction de saisie temporaire (en cas d’ouverture d’une procédure collective contre le débiteur) ou permanente.

Les interdictions permanentes correspondent aux immunités d’exécution qui sont liées à la personne. Les immunités d’exécution peuvent être définies comme un privilège personnel que la loi accorde à certains débiteurs pour les soustraire à toute mesure d’exécution

Quelles sont ces personnes contre lesquelles le créancier ne peut recourir à une exécution forcée ?

I_ LES PERSONNES BÉNÉFICIAIRES DE L’IMMUNITÉ DEXECUTION

Nous en avons deux catégories, celles du droit interne et celles du droit international.


/ LES IMMUNISÉS DU DROIT INTERNE

ART 30 DE L’AURVE « « il n’y a pas d’exécution forcée ni de mesures conservatoires contre les personnes morales de droit public, notamment l’État, les collectivités territoriales et les établissements publics » » 

Une analyse plus poussée de cet article nous amène à donner plus de détails sur cette catégorie de personnes. En ce qui concerne L’État, nous avons le gouvernement, les ministères, l’administration.

^ Les collectivités territoriales sont des structures administratives distinctes de l’administration de l’État, qui doivent prendre en charge des intérêts de la population d’un territoire précis.

 Nous avons la commune ; les régions ; les départements. 

Un établissement public est une personne morale de droit public financée par des fonds publics et qui doit remplir une mission d’intérêt général. Nous avons en côte d’ivoire les universités publiques, la Centre National de la Protection Sociale, LE CENAM ; le Centre National de la Documentation Juridique, les Centres Régionaux des Œuvres Universitaires, le Bureau ivoirien des Droits d’Auteurs, l’ENA. ENS ETC.

Toutes ces personnes morales de droit public bénéficient d’une immunité d’exécution forcée en cas de défaut de paiement d’une créance liquide.   

Qu’en est-il des personnes morales de droit public internationales  


/. LES PERSONES MORALES DROIT PUBLIC ÉTRANGER


Article 30-3 

« (...), il n’y a pas d’exécution forcée ni de mesures conservatoires contre les personnes morales de droit public étrangères et les organisations internationales qui bénéficient de l’immunité d’exécution en vertu de conventions sur les relations diplomatiques ou consulaires ou d’accords d’établissement ou de siège »

S’agissant des bénéficiaires de l’immunité d’exécution, il convient de préciser que la qualité de la personne en droit international demeure déterminante.

Cette immunité profite aux chefs d’états étrangers ou à leurs souverains à leurs agents diplomatiques, ambassadeurs ministres plénipotentiaires ainsi qu’à leurs subordonnés. Les immunités des États étrangers s’expliquent, tant par les exigences de la courtoisie internationale et les règles de droit international public que par la nécessite de ne pas faire obstacle au développement des relations diplomatiques. Par ce qu’ils sont souverains et égaux, les états ne sauraient être généralement soumis, sans leur consentement aux voies de droit d’un autre État.

LA GRANDE QUESTION QUI SE POSE EST DE SAVOIR COMMENT RECOUVRER UNE CRÉANCE QUAND LE DÉBITEUR EST UNE PERSONNE IMMUNISÉE ?

  Des l’entame de l’article 30 de l’AUPRVE on perçoit la renonciation expresse « Sauf renonciation expresse ».

LA RENONCIATION EXPRESSE 

La renonciation est un mécanisme par lequel une personne morale de droit public décide d’abandonner, de manière expresse (écrit ou clause), un droit ou un privilège dans sa relation contractuelle avec son cocontractant. Cette possibilité est reconnue aux États de renoncer à leur immunité puisque celle-ci est destinée à les protéger.

EN PRINCIPE cette renonciation doit être expresse c’est à dire être formellement exprimée, elle ne saurait donc être présumée.

Cependant, à travers certaines situations, la jurisprudence a admis la notion d’une renonciation implicite de l’État à son immunité d’exécution, à condition que cette renonciation soit certaine et régulière.

 LA COMPENSATION 

L’article 30 de l’AUPRVE en son alinéa 2 donne la possibilité de procéder par compensation pour recouvrer une créance liquide et certaine. « Toutefois, les dettes certaines, liquides et exigibles des personnes morales de droit public donnent lieu à compensation avec les dettes également certaines, liquides et exigibles dont personne ne sera tenu envers elles, sous réserve de réciprocité »

C’est un mécanisme qui permet au créancier d’éteindre sa propre dette envers une personne morale de droit public en la déduisant de la créance qu’il détient sur elle. C’est un mécanisme simple et efficace pour le créancier afin d’obtenir le paiement, sans recourir à une procédure contentieuse.

Une entreprise a une dette fiscale de 1.500.000 FCFA auprès de l’Etat. L’Etat a quant à lui une dette de 1.000.000 FCFA envers cette même entreprise. Grâce au mécanisme de compensation, l’entreprise n’aura plus qu’à payer 500.000 FCFA.

 En fin nous avons 

L’INSCRIPTION D’OFFICE AU BUDGET DE LA PERSONNE MORALE DE DROIT PUBLIC .

C’est un mécanisme qui permet aux créanciers d’inscrire d’office leur créance dans le budget d’une personne morale de droit public .


Article 30-1 

« « Toute créance constatée par un titre exécutoire ou découlant d’une reconnaissance de dette par une personne morale de droit public, notamment l’État, une collectivité territoriale ou un établissement public peut, après mise en demeure adressée à l’organe dirigeant ou à l’autorité compétente dans chaque État partie et restée infructueuse pendant un délai de trois mois à compter de la notification, faire l’objet d’une inscription d’office dans les comptes de l’exercice et dans le budget de ladite personne morale, au titre des dépenses obligatoires ».


A partir d’un titre exécutoire ou d’une reconnaissance de dette, le créancier oblige la personne morale de droit public à budgétiser le paiement de la créance, rendant le paiement plus contraignant et sécurisant le recouvrement pour le créancier

Pour illustration, L’État a une dette de 1.000.000 FCFA envers une entreprise. L’entreprise, en cas de silence de l’État, d’une mise en demeure restée infructueuse pendant un délai de trois mois à compter de la notification, peut procéder à la demande d’inscription, adressée au ministre chargé des Finances, accompagnée des pièces justificatives de la créance et de la mise en demeure.

Pour conclure on dira qu’aucune créance n’est irrécouvrable, que le débiteur soit une personne de droit privé ou de droit public. Bien vrai que, bénéficiant d’une immunité d’exécution, les créanciers disposent de différentes stratégies pour recouvrer leurs créances envers les débiteurs défaillant .




                                                                                                                                                                                                                                           Akoumo Ulrich

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